Origine de l'appellation

Le terme de "Montceau" doit son origine au latin. Plusieurs hypothèses sont envisageables :

Monte Salvo : Mont Saint
Monte Saeva : Mont Sauvage
Monte Silva : Mont de la Forêt
Monticellus : Petite Montagne

Les archives du 11° siècle indique " Monasterium Sancti-Felicis de Monte sevo ".
Monte Sevo, serait une déformation du latin vulgaire d'église Monte Salvo ( Mont Saint ), ce qui corroborerait notre étude architectonique sur la première occupation chrétienne, puisqu'un oratoire dédié à Saint-Félix aurait été implanté au VIII siècle.

Petite histoire de la vie du Saint

Saint-Félix, Martyr de Gérone, est né à Scilata, ville d'Afrique, célèbre pour les nombreux martyrs qu'elle donna à l'église dans l'antiquité. Il se consacra à ses études dans la ville de Césarée, Métropole de la Mauritanie, et eut alors connaissance de la sanglante persécution lancée contre les Chrétiens en Espagne, par les Empereurs Dioclétien et Maximien.

Désireux d'obtenir la palme du martyr, il s'embarqua sur un navire marchand qui voguait vers l'Espagne et arriva à Barcelone. De là, à Empurias, où il oeuvra pour le développement de la foi catholique. D'Empurias, il s'en fut à Gérone, catéchisant cette cité, fortifiant les gens dans la foi, dans la piété chrétienne avec tant de zèle, de ferveur et de doctrine, qu'il était tenu et vénéré comme "Docteur, Apôtre et Prophète".

L'ascension de sa renommée fut la raison pour laquelle Rufino, représentant de Dacien, Gouverneur des Espagnes, le fit arrêter et lui demanda en vain d'abjurer sa foi chrétienne. Il voulut alors le forcer par des tourments, demandant qu'on le fouette cruellement avec des verges, et que les pieds et les mains liés, on le jette dans un profond cachot, sans lui donner à boire ni à manger, et, qu'enfin, chargé de lourdes et grosses chaînes, on le traîne, tiré par des bêtes sauvages à travers les rues de la ville. Mais cette nuit là, quand il fut ramené dans sa prison tout sanglant et couvert de terribles plaies, il fut visité par un ange et guéri miraculeusement. Le lendemain, on le présenta devant les autels des idoles pour qu'il leur offre ses adorations et des sacrifices. Mais ils ne purent, ni avec des flatteries, ni avec des menaces, le soumettre ou faire vaciller sa constance. Ils lui déchirèrent alors la chair avec des crochets de fer en ayant pendu par les pieds son corps et l'ayant maintenu dans cette douloureuse situation, de trois heures au coucher du soleil.

Ensuite, ils le remirent à nouveau en prison où le Ciel vint une nouvelle fois le consoler. Cette nuit là on vit resplendir une brillante lumière céleste et on entendit de sonores cantiques d'harmonie angélique, dont les gardes mêmes, furent les témoins. Tout ceci fut rapporté à Rufino, qui, emporté par la fureur de se voir vaincu par la douceur et la fermeté du caractère du Saint, ordonna qu'on lui attache les mains dans le dos et qu'on le noie dans la mer. Mais les anges rompirent les attaches de ses mains, le soulevèrent pour le faire marcher sur les eaux jusqu'à, la plage, comme si c'était la terre ferme. Alors Rufino ordonna qu'on le déchiquette une nouvelle fois, et qu'on lui ôte la vie. Mais ce n'est pas pour cela que le glorieux Martyr fut vaincu. Ses tourments furent son triomphe et sa mort, son immortalité .

Le corps du très heureux Saint fut enterré à Gérone et vénéré avec grande dévotion et culte par la population de la Région comme par les étrangers, ce qui est confirmé par le grand nombre d'églises dédiées à son nom. Les Princes même, témoignèrent à ses obsèques. Le Roi des Goths, Récarédo, comprit l'importance de la dévotion à Saint-Félix et vint l'honorer. Sa Majesté, offrit comme présent de vénération à son sépulcre, la couronne d'or qu'il portait et qui ceignait ses royales tempes. Il existe encore la tête sacrée de ce grand Martyr, dans l'Eglise Collégiale qui porte son nom, où elle est exposée tous les ans, à la vénération publique, le jour de la fête du Saint, ( 12 Février ).

La création de l'Abbaye

Si nous connaissons dans les moindres détails la décadence et la fin de Saint-Félix de Montceau, nous ne pouvons en dire autant de sa fondation.

Il est mentionné dans un état des rentes et des revenus de l'Abbaye, dressé par l'Abbesse Anne de la Fare, le 20 octobre 1723, que l'Abbaye est fondée depuis un temps immémorial, et que d'autre part, les feuilles et archives ont été brûlées, ce qui paraît vraisemblable, puisque les grandes compagnies de ''Routiers", ont envahi le Languedoc après la guerre de Cent ans, et Saint-Félix a été plusieurs fois pillée et incendiée.

Selon les Bénédictins de la Gallia, le Monastère rayonnait déjà au XII° siècle, sous l'épiscopat de l'évêque de Maguelone Galtier, (1104-1129). L'un des documents, qui se trouve aux archives départementales est un parchemin daté de 1120, portant sur le dos : "Donation faîte de Galtier, évêque de Maguelone à Lucie, Abbesse de Saint-Félix de Montceau, d'une vigne sise à Gigean". En réalité, Galtier échange avec l'Abbesse de Saint-Félix une vigne située au mas de Garibert. Celle-ci avait été cédée à la Prieure Dominique au nom de l'évêque Godefroid (1080-1104) par son bayle (régisseur) Ebrard, à charge pour les religieuses de remettre chaque année à ce prélat six deniers et un setier (mesure de 120 litres) d'orge.

Si ce document ne nous donne pas la date exacte de la fondation, cela nous éclaire pour remonter au moins et avec certitude, jusqu'à la dernière année de l'évêque de Maguelone, Godefroid, mort en 1104. Quoi qu'il en soit, nous savons que Saint-Félix de Montceau était d'obédience Bénédictine, que sa première Prieure s'appelait Dominique, la suivante étant Lucie.

L'étude architecturale que vous lirez plus loin, a démontré que le site de Saint-Félix remonte à l'époque Wisigothique et surtout Carolingienne pour l'occupation religieuse, mais les découvertes archéologiques attestent d'une occupation Gallo-romaine et néolithique .

Le rayonnement de l'Abbaye

Le Couvent se développait dès le XII° siècle. Les papes protégèrent les Moniales par de nombreuses Bulles. En 1143, le Pape Lucius II, déchargeait les soeurs de Saint-Félix des sommes dues pour les pâturages ou les novales ( terres fraîchement défrichées ). L'abbaye possédait des terres, qui, selon l'usage courant, devaient payer des redevance plus ou moins élevées. C'était parfois une charge assez lourde, dont les communautés tenaient à en être dégrevées. Les papes les dispensaient facilement des dîmes et des novales, pour les terres qu'elles exploitaient elles-mêmes ou qu'elles faisaient cultiver de leurs propres deniers. Une fois obtenues, ces dispenses devenaient perpétuelles et les religieuses conservaient avec soin ces Bulles leur accordant cette faveur, car elles devaient parfois défendre leurs droits par des procès.
Par des donations, des ventes et des offices, l'Abbaye voyait croître sa prospérité. Entre autres en 1149 1163 et l I68, des domaines, des vignes et des droits apportèrent à la communauté religieuse d'importantes sommes d'argent.
En 1169, le Monastère devint Cistercien pour revenir deux siècles plus tard à l'obédience Bénédictine.

Les revenus augmentaient et au XIII° siècle, Saint-Félix atteint son apogée. Innocent IV établit cinq Bulles en faveur de l'Abbaye. ( Pour lire un extrait de la Bulle d'Innocent IV de 1253 ). Guilhem, Seigneur de Montpellier, laissait en l202 une importante somme d'argent pour célébrer la messe d'anniversaire des membres de sa famille.
Les gens à cette époque avaient peur du destin réservé à leur dépouille mortelle et souhaitaient bénéficier d'une sépulture dans un milieu béni où des personnes pieuses prieraient, afin de leur obtenir miséricorde auprès du divin juge. De là viennent tant de testaments et legs contribuant à l'essor des Abbayes, Monastères ou Couvents.
Par exemple Adélaïde Alméraza dans son testament de janvier 1194, livrait son corps pour être ensevelie à Saint-Félix, en donnant son lit, le prix de vente d'un champ et celui de ses vignes, pour le repos de son âme. Plus important pour l'Abbaye fut le legs du Château de Mireval, par la Reine Marie de Montpellier. Malheureusement, son fils, Jacques d'Aragon, s'opposa fermement à cette donation et offrit en échange l'Hôpital de Saint-Guilhem.

Les moniales apportaient également une dot à leur entrée dans le Couvent. Ainsi en février 1178, la veuve Adélaïde Salaron prenait le voile en "renonçant au Monde, livrait sa personne à Dieu et à Saint-Félix, et donnait à la Prieure Ermengarde et à toutes les religieuses présentes et futures, cinq pièces de terre situées dans la paroisse de Gigean".

A la fin du XIII° siècle, le nombre des religieuses ne cessa d'augmenter. De 14 en 1238, 18 en 1277, il passa à 26 en 1279, 28 en 1307. La chapelle romane ne pouvant plus convenir à la célébration du culte divin, une Prieure, dont nous ne connaissons pas le nom, fit ériger la merveilleuse abbatiale gothique, à la fin du XIIl° siècle, dont nous voyons aujourd'hui la quasi totalité de l'édifice.

Au XIV° siècle, l'Abbaye accusa de nombreux malheurs : la peste et le triste ravage des Routiers, Grandes Compagnies sans foi ni loi, qui pillaient et incendiaient toute la plaine du Languedoc. Le Couvent dépérissait et s'appauvrissait.

L'Abbaye à Gigean

Malgré l'apport de l'Abbaye de Saint Léon de Montmel, le redressement financier ne put se faire et Bone Garsabalde, dernière Prieure de la colline, décida d'abandonner Saint-Félix de Montceau et de fonder une seconde demeure à l'abri des remparts de Gigean en 1514.
Les frais de restauration, l'Insécurité, les procès interminables, amenèrent la Communauté Religieuse à déserter le magnifique horizon embaumé d'un air vif et frais. Abandonner ces vieux murs empreints de souvenirs, délaisser le paysage bucolique s'étendant à leurs pieds fut un profond déchirement pour la Prieure Bone Garsabalde. Mais la décision fut prise de et le Site fut quitté.

Les corps des moniales enterrées sous l'église furent emportés dans la seconde Abbaye, fondée à l'intérieur des remparts de Gigean. En 1517, 5 religieuses habitaient ce monastère, 3 en 1630, 3 en 1723. En 1749, 3 ans après le décès de la dernière Abbesse Anne de la Fare à l'âge de 84 ans, le Roi fit supprimer l'Abbaye ruinée. L'unique et dernière moniale, Marie de Manse fut transférée dans un autre monastère. L'Abbaye de Gigean - bien modeste - fut détruite au XIX° siècle, et la poste actuelle occupe ce lieu.

La vie des moniales à l'Abbaye

A l'origine le monastère suit la règle Bénédictine. Par une Bulle du 3 janvier 1169-1170, le Pape Alexandre III ordonne aux religieuses de Saint Félix de se soumettre à la réforme que l'évêque voulait leur imposer ( pour lire cette Bulle ). De quelle réforme est-il question ? Saint Félix est encore trop rapproché de ses origines pour avoir si vite perdu la ferveur qui règne d'ordinaire dans les jeunes Communautés.
Ne serait ce pas à cette date que le Monastère devint Cistercien ? Saint Bernard venait de mourir en 1153. La renommée de sa sainteté s'était étendue au loin et nombreux étaient les couvents bénédictins qui désiraient embrasser sa réforme.
Saint Félix voulut sans doute suivre le mouvement qui poussait tant de religieux vers un genre de vie plus austère. L'opposition de quelques soeurs provenait peut-être de ce qu'elles refusaient d'accepter le changement de règle et de coutume dont parle la Bulle, et que dépendait la majeure partie du Couvent.

La règle Cistercienne est plus rude. Pour les vêtements, les Moniales devaient porter une simple tunique de laine, une coule et un scapulaire de même nature. Pour la nourriture, elles ne devaient manger ni oeufs, ni viandes, ni laitages, ni poissons, ni graisses, uniquement que des légumes bouillis et encore du 14 septembre à Pâques et un seul repas par jour. Pour le couchage, elles devaient dormir sur une paillasse, sans draps et coucher toute habillée. Au milieu de la nuit, à la sonnerie de la cloche de l'Abbaye, elles devaient se lever pour aller prier et chanter Matines.

Les trajets dortoir - Eglise illustrent bien la différence entre les deux règles.
Lorsque le Bénédictin devait aller à l'office du dortoir à l'église, il devait faire l'itinéraire suivant : dortoir - cloître - église. Lorsque le Cistercien devait faire la même chose, il faisait l'itinéraire suivant : dortoir - église.
Saint Bernard, Ordre Cistercien, avait préconisé l'austérité, et au niveau des messes, un trajet très court était obligatoire entre le dortoir et l'église en entrant directement par une porte située le plus souvent en hauteur dans le choeur , du côté sud de l'Abbatiale. Un escalier permettait d'accéder alors dans l'église. A Saint-Félix de Montceau, nous trouvons encore les traces des deux Ordres. Pour plus de détails, voir le chapitre sur les dortoirs.

En 1457 l'Abbaye était encore d'obédience cistercienne Elle redevint Bénédictine par la suite.

La vie des moniales de Saint Félix a du connaître un certain désordre un moment donné, puisque le 4 juin 1332, Jean de Vissec, Evêque de Maguelone monta à l'Abbaye pour y porter une ordonnance visant à rétablir une vie plus conforme aux règles d'un monastère. Il interdit notamment aux moniales de Saint-Félix "d'assister aux veillées des militaires, aux noces, de chanter des chansons légères, conduire des danses et prononcer publiquement des paroles déshonnêtes, ainsi que cela s'est produit quelquefois, comme on nous l'a affirmé, au mépris de Dieu, au scandale de plusieurs et au péril des âmes". ( Pour lire l'Ordonnance ).

De cet écrit naîtra une maxime : " Saint-Félix de Montceau, douze nonnes, treize berceaux ". Les moniales avaient elles fauté avec des hommes ou des soldats ? Aucun ossement de nourrisson n'ont été découverts.

Par contre Il existait bien une cellule appelée "l'Enfermerie", pour enfermer les religieuses qui avaient outrepassé gravement la règle communautaire. ( Voir les Bâtiments annexes ).

Les Prieures et Abbesses de l'Abbaye

  1. Dominique, 1104, peut-être avant
  2. Lucie, 1120
  3. Raimonde, 1162
  4. Ermengarde, 1170 - 1182
  5. Lombarde, 1195 - 1197
  6. Sibilde ou Sibende, 1207
  7. Marsibille, 1223
  8. Ermengarde, 1231
  9. Marie Itier, 1238 - 1248
  10. Guillaumette de Soriech, 1262 - 1270
  11. Marie-Roger, 1288 - 1294
  12. Bérengère de Soriech, 1303 - 1309
  13. Cécile de Boidelis, 1335 - l390
  14. Alamande de Saussan, 1399
  15. Jeanne de Montlaur, 1423 - 1457
  16. Marie des Ports, 9 Août 1457, morte le 17 Août 1479
  17. Bone Garsabalde, 1479, Prieure encore le 1 Mai 1492
  18. Jeanne Garsabalde, 1496, morte en 1517
  19. Anne Garsabalde, 7 mai 1517 - 1554
  20. Marguerite Garsabalde, 1554 - 1583
  21. Isabeau de Roquefeuil de Montpeyroux 1590 - 1600
  22. Jeanne Carcassonne de Soubés 1600 - 1638
  23. Marie de Bournet de Marignac
  24. Louise de Fabre, 1666 -1676
  25. Catherine-Angélique de Joly 1677 - 1692
  26. Renée-Angélique de la Croix de Castries, 1693 - 1722
  27. Anne de la Fare, 1722 - 1746


Bulle d'Innocent IV de 1253 en faveur de l'Abbaye St Félix de Montceau

Nous vous défendons d'aliéner n'importe quel bénéfice appartenant à votre église, sans le consentement du chapitre ou de sa majeure partie. Seront considérées comme nulles toutes les aliénations faîtes autrement.

En vertu de notre autorité apostolique, nous défendons aux évêques ou à toute autre personne de vous assigner devant les tribunaux séculiers et de soumettre vos propriétés à leurs décisions. Défense aussi leur est faîte de s'introduire dans vos maisons pour y traiter des affaires, y célébrer des ordinations ou y convoquer des réunions publiques. Qu'ils ne s'immiscent pas non plus dans la libre élection de votre Abbesse, soit pour l'empêcher, soit pour la révoquer une fois élue.
Pour la consécration de vos autels et de vos églises, la bénédiction des Saintes Huiles ou l'administration des sacrements vous seront donné gratuitement sans que l'on puisse invoquer un usage contraire par l'évêque du Diocèse ou sur son refus par un autre évêque en union et en communion avec Rome.
Pendant la vacance du siège épiscopal, vous serez libres de vous adresser pour la réception des sacrements à un évêque voisin , pourvu que de ce fait aucun préjudice ne soit porté dans l'avenir à la juridiction de l'évêque du Diocèse.

Tant que le Siège de Maguelone n'aura pas de titulaire, il vous sera loisible de demander au premier évêque de passage, s'il est connu de la Prieure ou de ses soeurs, la bénédiction des Religieuses, des vases sacrés et la consécration des autels.
Toute sentence d'excommunication, de suspense ou d'interdit, portée contre les induIts du Saint Siège est nulle de plein droit. Vous pourrez continuer les offices dans votre chapelle, après en avoir expulsé les excommuniés et les interdits.

Que nul ne se permette de porter le trouble dans le présent monastère, de prendre ses biens Ou de les retenir injustement. Mais que soit maintenu au contraire, tout ce qui est nécessaire à l'administration de cette Maison.


Alexandre III ordonne aux religieuses de Saint-Félix de Montceau de se soumettre à la réforme que l'évêque veut leur imposer, en accord avec la majeure partie d'entre elles.

Fait à Beneventum aux troisièmes nones de Janvier 1169.


" Alexandre III, serviteur des serviteurs de Dieu, avec l'amour dans le Christ pour ses soeurs de Saint-Félix, son salut et sa bénédiction apostolique. Nous savons avec notre vénérable frère, évêque de Maguelone, que, après consultation et l'assentiment d'une très raisonnable partie d'entre vous, vous alliez modifier en mieux votre vie et votre manière d'être. Ceci malgré les sentiments de celles qui s'efforçaient de résister à ce règlement avec insistance.
Je dicte dès maintenant ces obligations à notre évêque non seulement pour que ces choses ne soient pas rejetées mais encore pour vous inviter à ce qu'elles soient réalisées. Nous envoyons à votre communauté cet écrit pour que les parties saines de votre majorité décident les réformes de votre Monastère. Que cette réforme soit accueillie fermement sans aucune contradiction ou aucun appel. Du reste, nous voulons maintenir cette solide charte sous notre autorité. Qu'elle soit appliquée régulièrement sauf si, d'aventure, quelque chose était modifié dans les lois de l'église romaine ou si vous pouviez présenter un autre droit légal contre elle ".

Ordonnance du 4 juin 1332 de Jean de Vissec, Evêque de Maguelone

" A nos très chères soeurs, les vénérables religieuses, Prieure et Communauté de Saint-Félix de Montceau, Monastère situé sur notre Diocèse, et dépendant de notre Juridiction immédiate, salut et communion, dans le Seigneur Jésus-Christ.

Désireux, autant que cela nous est permis par le Très-Haut de procurer l'accroissement et la pureté de la religion, et de régler certains détails, relatifs à la réforme de votre règle et de vos constitutions ; afin que, épouses immaculées de votre Maître Jésus-Christ, vous puissiez vous acquitter de vos devoirs et consacrer avec plus d'ardeur votre temps aux choses divines, pour la plus grande gloire de Dieu, de Jésus-Christ notre Maître et de la glorieuse Vierge-Marie, sa mère, qui, par sa virginité et son humilité, doit servir d 'exemple aux vierges consacrées à Dieu, nous prescrivons et nous ordonnons :

Avec les quarante livres léguées autrefois, pour faire brûler un cierge devant l'autel de la bienheureuse Vierge, il sera acheté des rentes, qui, unies aux autres revenus, serviront à faire brûler un cierge aussi longtemps que ces rentes le permettront à moins que, du consentement de la Prieure ou de la Communauté, ou de la majeure partie de celle-ci, vous préfériez fonder un Obit annuel ou perpétuel pour le repos de l'âme du donateur. Le surplus sera employé à donner à chaque soeur de l'Abbaye, à titre d'aumône, deux deniers, plus ou moins, suivant le nombre des religieuses ou la quantité des revenus. Au jour fixé pour la célébration de l'Obit, chaque moniale devra réciter un psautier pour le repos de l'âme du bienfaiteur et pour celle de ses parents.

On nous a dit que des personnes tant religieuses que séculières, et même des femmes, sont admises à séjourner fort longtemps dans l'Abbaye, ce qui occasionne de grandes dépenses, augmente gravement les charges de la Communauté et détourne de leurs devoirs les religieuses employées au service des étrangers.

Nous défendons de recevoir dans la Maison, au-delà d'une journée entière, aucun religieux accompagné de ses parents. Une chambre convenable sera préparée, où le confesseur, pendant le temps requis à l'exercice de son ministère, pourra se reposer honnêtement. Mais les jeunes filles, les femmes séculières ou les enfants seront hébergés que l'espace de trois semaines dans le courant d 'une année.

Comme il ne convient pas que des vierges consacrées séjournent dans les demeures des personnes séculières, ou se mêlent aux réunions d'hommes, nous défendons aux religieuses d'assister aux veillées des militaires, aux noces ou à quelqu'autre solennité publique. Elles ne donneront pas leurs soins aux femmes en couche, soit pendant, soit après leur délivrance. Que la Prieure n 'accorde jamais de semblables permissions.

Si pour traiter des affaires du Couvent et avec l'assentiment de la Prieure, une soeur est obligée de sortir du Monastère, son absence ne durera pas plus d 'un mois, à moins qu'elle ne soir retenue par un empêchement légitime et inévitable.
Si cette soeur se trouve dans un endroit trop éloigné, elle devra, le mois écoulé ou le plus tôt possible, s'excuser par des lettres ou par un messager. Si la Prieure n'admet pas ses raisons, la religieuse, sauf le cas de maladie, s'empressera de se rendre.

Comme dans la Maison de Dieu, les Vierges consacrées ne doivent se livrer qu'au chant des hymnes et des cantiques, composés à la gloire de Notre Seigneur Jésus-Christ, nous défendons très sévèrement, et en vertu de la sainte obéissance, à n'importe quelle personne de quelque sexe ou de quelque condition qu'elle soit de profiter de la fête de Saint-Félix ou celle des autres Saints, de la prise de voile ou de la bénédiction des soeurs, soit dans la chapelle soit dans une autre partie de l'Abbaye, pour chanter des chansons légères, conduire des danses et prononcer publiquement des paroles déshonnêtes, ainsi que cela s'est produit quelquefois, comme on nous l'a affirmé, au mépris de Dieu, au scandale de plusieurs et au péril des âmes.

Nous ordonnons que ce que nous venons de décréter soit observé par tous, sous peine d 'excommunication, et de toute autre peine que nous jugerions devoir porter. Et, pour que personne, homme ou femme, n'en ignore, notre ordonnance sera publiée.

De plus, nous voulons que toutes et chacune des religieuses, si elles ne veulent encourir les peines dont nous venons de parler, obéissent à l'Abbesse en tout ce qu'elle leur commandera d'honnête et de permis.

Nous voulons encore que les jeunes surtout, assistent dans l'église aux offices du matin et du soir, à moins qu'elles ne soient retenues par un empêchement légitime que constatera l'Abbesse ou sa remplaçante.

Que les religieuses se soumettent promptement aux ordres divins, afin que, avec leurs lampes allumées, elles puissent après leur mort être admises aux noces de leur époux immaculé, Notre Seigneur Jésus-Christ ".